les grenouilles grouillent

Malgré la froidure, les nuages bas et les petits matins gelés, elles reviennent, inexorablement, les unes après les autres… nos grenouilles ! Chaque matin, je vais guetter, vérifier si elles sont vraiment de retour. Aujourd’hui, alors que le soleil perce enfin les couches nuageuses, que l’air se réchauffe doucement, entre les herbes flottantes et les roseaux desséchés, les choses sérieuses commencent.

Des dizaines de petites têtes sont à l’affut et émettent de sourds vrombissements, un chant d’amour qui, pour nos oreilles impassibles, évoque plus une course de moto qu’une sérénade ! Lorsqu’une gente dame grenouille passe à proximité, ces messieurs exaltés bondissent en tous sens. C’est alors un grouillement de pattes, de têtes qui frétillent; l’eau bouillonne, éclabousse jusqu’à ce que chacun ait trouvé son bonheur. Alors, rassasiés, de petits monstres à deux têtes émergent des flots et oeuvrent tranquillement à la survie de l’espèce…

Les grenouilles restent néanmoins toujours aux aguets. Si je m’approche un peu trop brusquement, si l’ombre d’un rapace passe sur l’étang, elles disparaissent en un éclair et rejoignent des eaux plus profondes. Comme traces de leurs amours subsistent des millions de petites billes translucides, formant d’innombrables amas gélatineux … on dirait des colonies de chou-fleur tapissant le fond des rives ensoleillées. Pour ces minuscules êtres en devenir, commence alors la dure lutte pour la survie … car les prédateurs de l’étang se réveillent aussi doucement et sont affamés !

Combien d’entre eux résisteront jusqu’à l’été ? les verrons nous devenir adultes à leur tour ? Apparemment, dans des conditions naturelles, les ratios de survie sont bien calculés puisque chaque année les grenouilles rousses reviennent plus nombreuses… pour notre plus grand plaisir.